refus de soins

L’impossibilité de limiter la réparation du préjudice de la victime en raison de son refus de soins

Par Le 28/11/2016

Un couple a été victime d’un accident de la circulation. Le mari est décédé et l’épouse a été déboutée par la Cour d’appel de Dijon de sa demande tendant à l’indemnisation de la perte de gains professionnels actuels et des souffrances morales et psychologiques nées de l’angoisse d’une mort imminente qu’aurait ressenties son mari entre la survenance de l’accident et celle de son décès. Dans son arrêt du 27 septembre 2016 (n° 15-83309) la Chambre criminelle de la Cour de cassation réaffirme différents principes.

Tout d’abord, elle considère que la Cour d’appel a justifié sa décision dès lors que le préjudice d’angoisse de mort imminente ne peut exister que si la victime est consciente de son état, ce qui en l’espèce n’était pas le cas dans la mesure où le défunt était demeuré inconscient entre l’accident et son décès.

En revanche, la Cour de cassation infirme la décision de la Cour d’appel et retient que « le refus d’une personne, victime du préjudice résultant d’un accident dont un conducteur a été reconnu responsable, de se soumettre à des traitements médicaux, qui ne peuvent être pratiqués sans son consentement, ne peut entraîner la perte ou la diminution de son droit à indemnisation de l’intégralité des préjudices résultant de l’infraction. »

En conséquence, la Haute Juridiction considère que la Cour d’appel aux visas des articles 16-3 et 1382 (anciennement) du code civil a méconnu le sens et la portée desdits textes.

La réparation du préjudice universitaire de l’épouse causé par la mort accidentelle de son mari ne pouvait être limitée en raison du fait qu’elle ait délibérément interrompu les traitements antidépresseurs et thérapeutiques qui lui étaient préconisés par les experts et poursuivi une auto-prescription médicamenteuse conduisant à la dégradation de son état psychologique, ruinant ainsi toute possibilité de restaurer la poursuite de ses études engagées avant l’accident.

Ainsi, la Cour de cassation, une nouvelle fois, réaffirme le refus du principe de la mitigation consistant en l’obligation, pour la victime, de limiter l’importance et l’étendue de son préjudice. La jurisprudence française, contrairement à ce qui est pratiquée dans d’autres pays, retient que la victime n’est jamais tenue de limiter son préjudice dans l’intérêt du responsable. Elle peut donc, par exemple, ne pas se soumettre à un traitement préconisé par les experts pour améliorer son état de santé.

C’est une nouvelle fois la consécration du libre choix du malade quant à son traitement médical en dehors du cas où l’acte est indispensable à la survie et proportionné à l’état du patient.