Le juge ne peut pas aller à l’encontre de l’appréciation médicale

claireperillaud Par Le 05/07/2023

La Cour de cassation a rappelé, le 8 février 2023 (n° pourvoi 22-10.852), qu’il est interdit au juge statuant sur le maintien d’une mesure d’hospitalisation sous contrainte de porter une appréciation d’ordre médical.

Les faits étaient les suivants :

  • en janvier 2021, sur fondement de l’article L. 3212-3 du Code de la santé publique (CSP), une patiente est admise en soins psychiatriques sans consentement sous la forme d’une hospitalisation complète par décision du Directeur d’établissement et à la demande de son père,
  • puis elle est autorisée à effectuer un programme de soins,
  • mais, en novembre 2021, le Directeur décide de réadmettre la patiente en hospitalisation sans consentement et saisit le juge des libertés et de la détention en ce sens, sur le fondement de l’article L. 3211-12-1 du CSP.

Sur un pourvoi en cassation du Directeur, la Cour de cassation casse l’ordonnance précédemment retenue : le juge saisi sur le fondement de l’article L. 3211-12-1 du CSP aux fins de se prononcer sur le maintien de l’hospitalisation complète d’un patient doit s’abstenir de porter toute appréciation d’ordre médical.

Elle retient :

« 5. Aux termes du premier texte, une personne atteinte de troubles mentaux ne peut faire l'objet de soins psychiatriques sur la décision du directeur d'un établissement mentionné à l'article L. 3222-1 que lorsque les deux conditions suivantes sont réunies :
1° ses troubles mentaux rendent impossible son consentement ;
2° son état mental impose des soins immédiats assortis soit d'une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète, soit d'une surveillance médicale régulière justifiant une prise en charge sous la forme mentionnée au 2° du I de l'article L. 3211-2-1.

6. Lorsqu'il est saisi sur le fondement du second texte, aux fins de se prononcer sur le maintien de l'hospitalisation complète d'un patient, le juge doit examiner le bien-fondé de la mesure au regard des éléments médicaux, communiqués par les parties ou établis à sa demande, sans pouvoir porter une appréciation d'ordre médical.

7. Pour prononcer la mainlevée différée de l'hospitalisation complète de Mme [O], après avoir constaté que l'ensemble des éléments médicaux figurant à la procédure justifient la poursuite de la mesure d'hospitalisation complète sous contrainte, l'ordonnance retient qu'il paraît néanmoins adapté à la situation de l'intéressée, qui a déjà passé de longs mois au sein de l'hôpital et qui a été réhospitalisée à la suite d'une rechute, d'ordonner une mainlevée afin qu'à la suite de permissions de sortie qui se sont avérées positives, l'hôpital puisse mettre en place un programme de soins dans l'intérêt de Mme [O], cette mesure pouvant être de nature à lui laisser la possibilité de poursuivre ses études, nonobstant sa pathologie chronique dont elle semble désormais être consciente à l'audience.

8. En statuant ainsi, alors que les certificats médicaux, dont le caractère régulier et circonstancié n'était pas contesté, se prononçaient tous en faveur du maintien de l'hospitalisation complète, le premier président, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les textes susvisés. »

Pour la Haute juridiction dans la mesure où l’ensemble des éléments médicaux communiqués justifiaient la poursuite de la mesure d’hospitalisation complète, le juge ne peut pas invoquer d’autres arguments, aussi pertinents soient-ils.

Il peut en revanche toujours solliciter des éléments médicaux complémentaires.

Le juge doit donc suivre l’appréciation portée par le médecin dans les certificats médicaux.